Ighil M’Goun
Espaces infinis, silence, solitude… Le plateau de Tarkedit expose ses nappes de gris, ocres, mauves, violets, estompées de lumière. Au-dessus, massive, puissante, trapue, impressionnante, toute la chaîne du M’Goun impose sa présence. Un lieu hors du monde et hors du temps; on s’imagine sur les hauts plateaux de Mongolie.
Perdu dans cette immensité, le refuge semble une boîte d’allumettes oubliée là. On le quitte de nuit, à la lumière de la lune, pour emprunter un vallon minéral par un sentier à la pente soutenue. Avec les premières lueurs de l’aube, un vent violent se lève: il fatigue, déstabilise, coupe la respiration en s’engouffrant dans le nez et la bouche. Le chemin est large, constitué de lamelles de schistes délités, qui lui donnent une dominante anthracite. Il faut marcher environ 3h30 pour atteindre la crête et découvrir l’ampleur du paysage, accueillir les premiers rayons de soleil et profiter d’un répit du vent.
A gauche, une succession de cirques majestueux bordés de falaises et de roches déchiquetées; des pierriers gigantesques semblent y couler comme des fleuves minéraux. A droite, une série de chaînes colorées, rouges, jaunes, vertes, mauves, qui se perdent vers le sud et la vallée du Dadès. Le sommet n’a rien de spectaculaire, une rondeur un peu haute que les autres alentour; on y goûte l’infini plaisir d’être là et on contemple à 360° un paysage qui se grave à jamais dans ma mémoire. De l’autre côté du sommet la descente est rapide et ludique. Le sentier, spectaculairement raide, est constitué d’une sorte de gravier où le talon accroche parfaitement; il est possible de prendre de la vitesse, voire de courir, et cela en toute sécurité. Un chaos rocheux en marque le terminus. Reste à suivre un ravin qui surplombe une superbe vallée qui semble ne pas se terminer, teinté de rouge, d’ocre, de vert, avec le gris de l’oued au fond. Petit point blanc dans cet infini, le bivouac est déjà planté pour une nuit intense et réparatrice, dans le silence parfait de l’altitude.
JLB 26/09/2022