littoral / nature
Ma pratique photographique a longtemps été liée au temps libre et à l’ailleurs. A l’occasion d’un voyage à Rome en 1997, une impulsion soudaine m’a fait revenir au noir et blanc, délaissé depuis nombre d’années. En effet, je me consacrais alors à d’autres pratiques, comme la sculpture. A partir de ce moment-là, la photo est redevenue mon principal mode d’expression et des thèmes ont commencé à émerger, des ensembles à se constituer. Mais ces images venaient souvent d’autres lieux, puisque temps libre rimait avec escapades, vacances itinérantes, voyages : quelques villes d’élection, des régions du sud de la France, des montagnes, des îles, des pays voisins, des petits morceaux d’Afrique parcourus à pied.
Il m’a fallu attendre 2013 afin de disposer de plus de temps pour pratiquer la photographie de manière approfondie dans la région où je suis né et où j’ai toujours vécu. Je souhaitais accorder au moins la même attention à ce territoire qu’à ceux où je ne faisais que passer.
Je n’avais pas d’intention précise au départ, sauf l’exploration d’une aire géographique : le littoral sud de la Vendée, de Brem-sur-Mer à l’Aiguillon-sur-Mer, une zone préservée qui a échappé aux aménageurs des années 1960. De part et d’autre des Sables-d’Olonne, le paysage côtier est constitué d’immenses plages de sable, d’un estran varié et riche en surprises, de grandes zones de dunes, de longues forêts, de marais et d’innombrables sentiers. Pas d’autre idée au départ que de marcher inlassablement dans ces espaces et d’en ramener des images. J’étais loin d’imaginer ce qui allait suivre…
D’abord le dépaysement et la jubilation éprouvée à parcourir seul ces espaces, souvent tôt le matin, à trouver sans cesse de nouveaux chemins, des accès à des zones qui m’étaient inconnues, et un plaisir comparable à celui ressenti dans des paysages d’altitude ou des régions désertiques. D’où une première inflexion qui devint vite une décision : la nature, rien que la nature ! Dans mes images, pas d’humains, peu de traces d’activité humaine, mais la nature, splendide, essentielle, éternelle.
Ensuite sont remontés à la surface des sensations oubliées, des souvenirs enfouis, ceux d’une enfance vécue dans ces mêmes lieux, littoral des vacances d’été et campagne environnante, avec en prime une liberté qui n’a plus cours. Et cet attrait indissoluble, noué à cette époque, pour les éléments naturels : l’eau, le vent, le soleil, le ciel, le végétal, le minéral, qui m’entraînait toujours plus avant dans mon exploration.
Je me suis vite rendu compte que ce « travail » que je m’étais donné n’était en fait que du plaisir, que cette recherche n’en était pas une, qu’il me suffisait de suivre mon instinct, de m’abandonner, pour que les sujets viennent à moi.
Les séries photographiques que je présente sont toutes issues de rencontres et d’inattendu. Deux ou trois photos rapportées d’une première approche avec un sujet potentiel et je n’avais plus qu’à tirer le fil, à développer le thème en recherchant lieux et moments susceptibles d’enrichir la série. Dernière évidence : ce travail n’est pas terminé et ne le sera sans doute jamais. Je m’étais donné deux ans pour le mener à bien, mais d’autres séries sont déjà en cours et il est probable que d’autres sujets émergeront tant que je continuerai à arpenter la région.
Au final, une sélection d’une dizaine de séries photographiques, certaines définitivement closes, d’autres qui restent ouvertes. Jamais je n’aurais pu imaginer il y a quelques années ce que je propose aujourd’hui aux regards, aussi bien au niveau du contenu des images que de la forme. Il ne s’agit en aucun cas d’un inventaire exhaustif de cette région, il est d’ailleurs très difficile de situer ces images sans légendes. Uniquement une vision rapprochée et sensible où je tente de magnifier les éléments naturels par mon approche et le langage photographique utilisé.